Lorsque Yves Saint Laurent découvre Marrakech en janvier 1967 à l’âge de 33 ans, il en tombe immédiatement amoureux. Cette ville lui rappelle l’Algérie de son enfance et il s’y sent chez lui. Mais c’est surtout un choc esthétique et sensuel. Il dira plus tard « Avant, je n’utilisais que des teintes sombres. Le Maroc est arrivé avec ses couleurs… Celles de la terre et du sable. Mais aussi celles de la rue : les femmes en caftan turquoise, mauve… Et le ciel. » D’après Laurence Benaïm, cette découverte est pour lui une véritable initiation, Marrakech devient sa « capitale de la lumière et du désir ».
Yves Saint Laurent et Pierre Bergé achètent une maison dans les trois jours, le Dar el Hanch (la maison du serpent), au beau-frère de Barbara Hutton. C’est une maison simple et pleine de charme, « les pièces sont comme de petites boîtes, reliées les unes autres par des escaliers miniatures. On descend trois marches, on en remonte quatre », qu’ils décorent avec des objets marocains trouvés dans les souks.
Une petite maison mais toujours pleine à craquer dira Betty Catroux. Yves Saint Laurent y passera désormais trois mois par an et les amis défilent, généralement au moment de Pâques : Thadée Klossowski, Hélène Rochas, Loulou de La Falaise, Clara Saint, Charlotte Aillaud, Fernando Sanchez…
Pierre Bergé se souvient de cette époque extraordinaire : « C’était l’âge d’or. L’Orient. Des dîners merveilleux. Des gens en caftan. Des domestiques, des orchestres dans les jardins. Une atmosphère des mille et une nuits. Nous étions fous de Wagner. On partait dans les champs d’abricots, on faisait des pique-niques lointains… »